19 juin 2020 – Information juridique – Contrôleure Générale des Lieux de Privation de Liberté – Droits des patients – Recommandations en urgence du 25 mai 2020 du Contrôleur général des lieux de privation de liberté relatives à l’établissement public de santé mentale Roger Prévot de Moisselles (Val-d’Oise)
Au JORF n°0150 du 19 juin 2020 ont été publiées les recommandations en urgence de la Contrôleure générale des lieux de privation de liberté relatives à l’établissement public de santé mentale Roger Prévot de Moisselles.
Comme précisé en préambule, la Contrôleure indique qu’à l’occasion de cette visite, des violations graves des droits des personnes privées de liberté ont été constatées. Elles résultent d’une confusion entre le régime de l’isolement psychiatrique institué par le Code de la santé publique et le confinement sanitaire décidé par les pouvoirs publics afin de lutter contre la propagation du covid-19.
Il m’importe de rappeler également et de souligner le caractère NÉCESSAIRE, ADAPTÉE et PROPORTIONNÉE de toute mesure restrictive à l’exercice des libertés individuelles (exigence stricte notamment posée à l’article L.3211-3 du Code de la santé publique).
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La Contrôleure générale des lieux de privation de liberté, informée de pratiques portant gravement atteinte aux droits fondamentaux des personnes hospitalisées, a visité l’établissement public de santé Roger Prévot de Moisselles (Val-d’Oise) le lundi 18 mai 2020, accompagnée de trois collaborateurs.
A l’occasion de cette visite, des violations graves des droits des personnes privées de liberté ont été constatées. Elles résultent d’une confusion entre le régime de l’isolement psychiatrique institué par le code de la santé publique et le confinement sanitaire décidé par les pouvoirs publics afin de lutter contre la propagation du covid-19. Bien que, localement, des mesures correctrices aient été prises dès les jours qui ont suivi la visite, la gravité des violations constatées et le risque que cette ambiguïté provoque des atteintes de même nature aux droits des patients accueillis dans d’autres établissements de santé mentale justifient l’usage de la procédure prévue à l’article 9, alinéa 2, de la loi du 30 octobre 2007 instituant un Contrôleur général des lieux de privation de liberté : « S’il constate une violation grave des droits fondamentaux d’une personne privée de liberté, le Contrôleur général des lieux de privation de liberté communique sans délai aux autorités compétentes ses observations, leur impartit un délai pour y répondre et, à l’issue de ce délai, constate s’il a été mis fin à la violation signalée. S’il l’estime nécessaire, il rend alors immédiatement public le contenu de ses observations et des réponses reçues. »
Les présentes recommandations ont été adressées au ministre des solidarités et de la santé le 25 mai 2020 ; il lui a été demandé de faire connaître ses observations avant le jeudi 4 juin. Aucune réponse n’est parvenue au contrôle à la date de publication des présentes recommandations.
Prenant en charge les patients de cinq secteurs de psychiatrie adultes des Hauts-de-Seine, l’établissement, situé dans le Val-d’Oise, est éloigné du domicile des patients comme des structures extrahospitalières. Il compte huit unités d’hospitalisation à temps complet (dont une située à Nanterre) pour 174 lits.
Les contrôleurs ont visité :
– l’unité d’hospitalisation complète « Clichy 2 », transformée en unité pour patients atteints de covid-19 (cinq lits), et en unité « entrants » (dix lits et une chambre d’isolement) ;
– l’unité « entrants » (dix lits et une chambre d’isolement), ouverte le 10 mai ;
– l’unité d’hospitalisation « Levallois-1 » du pôle « G04 Levallois-Perret ».
Les contrôleurs se sont entretenus avec plusieurs patients hospitalisés ainsi qu’avec des médecins et infirmiers de ces unités.
Les unités « entrants » accueillent tous les patients entrant dans l’établissement pour une période d’observation de 72 heures au maximum. L’unité « covid », accueille ceux qui sont atteints de covid-19. Ces unités sont placées sous la responsabilité d’un médecin somaticien et non d’un psychiatre.
Dans les jours précédant cette visite, la Contrôleure générale des lieux de privation de liberté avait été informée d’atteintes aux droits fondamentaux des personnes hospitalisées dans l’établissement.
Le jeudi 7 mai 2020, deux patients de l’unité d’hospitalisation du pôle « G02 Asnières-sur-Seine », testés positif au covid-19, ont été transférés dans l’unité « covid ». Dans la soirée, le psychiatre de garde et la direction de l’établissement ont décidé, sans tracer par écrit cette initiative, de confiner, porte fermée à clé, tous les autres patients de l’unité « Asnières-sur-Seine », y compris ceux admis en soins libres et ceux hébergés dans des chambres doubles. Le lendemain, un autre psychiatre de garde a fait réouvrir l’ensemble des chambres après avoir expliqué à chaque patient la nécessité, pour raison sanitaire, de rester confiné dans sa chambre.
Le mercredi 13 mai, le CGLPL a été informé que toutes les chambres des unités « entrants » et « covid » de l’établissement étaient fermées à clé et qu’une patiente, hébergée dans une unité « entrants », au deuxième étage, avait été gravement blessée et admise aux urgences somatiques après être sortie par la fenêtre de sa chambre qu’elle avait brisée. Le CGLPL ignore si cette patiente souhaitait se donner la mort par défenestration ou si, plus probablement, elle ne désirait que recouvrer sa liberté de mouvements.
Au moment de la visite, dix-huit patients étaient hospitalisés dans les unités « entrants » et « covid », dont six admis en soins libres. Les contrôleurs ont constaté que toutes les chambres de ces unités étaient fermées à clé.
Ces événements et constats révèlent une confusion absolue entre les notions de « confinement sanitaire » et d’« isolement psychiatrique ». Des patients ont été enfermés à clé 24 h sur 24 sans que leur état clinique psychiatrique le justifie, sans décision médicale écrite émanant d’un psychiatre ni traçabilité et, au surplus, dans des espaces dangereux car non aménagés à cet effet. Ces patients ont été enfermés sur décision du médecin généraliste, prise sur le fondement de la circulaire Minsante99 du 9 mai 2020. Pourtant, le confinement strict en chambre fermée à clé n’est pas mentionné dans cette circulaire, mais les praticiens l’ont décidé en lui donnant un caractère systématique, prétendant que les patients de psychiatrie ne seraient pas à même de comprendre et de respecter les gestes barrière.
Ces privations de liberté injustifiées et illégales ont été mises en œuvre dans des conditions indignes.
Les chambres ne reçoivent la lumière naturelle que par une baie vitrée non ouvrable et une étroite imposte verticale (20 cm) ouvrable qui permet un faible renouvellement d’air. Elles ne sont équipées ni de poste de télévision, ni, sauf exception, de radio, ni d’horloge. Celles de l’une des unités « entrants » n’ont pas de bouton d’appel et dans l’autre unité « entrants » et l’unité « covid », plusieurs de ces boutons ne fonctionnent pas.
Lors de la visite, les patients ne disposaient pas de leurs effets personnels, ils étaient habillés d’un pyjama en tissu déchirable et les sous-vêtements avaient été retirés à certains d’entre eux. Les chambres n’étaient pas équipées de douche, du matériel de toilette était mis à disposition sans nécessaire de rasage pour les hommes. La toilette au lavabo était préconisée car l’accès à la douche extérieure mobilisait trop de personnel.
La plupart des patients disposaient de leur téléphone portable, car il n’est retiré qu’en cas d’usage pathologique. Les patients fumeurs étaient autorisés à fumer dans leur chambre. Dans l’une des unités « entrants », les chaises avaient été retirées des chambres après qu’un patient se soit servi de la sienne pour tenter de briser une vitre : une chaise était apportée à chaque patient pour le repas puis reprise.
La notification de la mesure et l’information des patients en soins sans consentement sur leur statut et leurs droits n’étaient pas assurées pendant leur séjour dans ces unités.
Par ailleurs, le pôle « G04 Levallois-Perret » avait instauré une contrainte de confinement supplémentaire : les patients accueillis au terme de leur séjour en unité « entrants » étaient soumis à une obligation de confinement strict en chambre pendant quatorze jours supplémentaires, parfois porte fermée à clé « s’ils ne se plient pas à cette mesure ». Depuis le début de la pandémie, plusieurs patients ont ainsi été enfermés à clé dans leur chambre. Il a été affirmé aux contrôleurs que ces décisions étaient prises par des psychiatres du pôle ou par ceux du secteur d’origine du patient en cas d’hébergement hors secteur ; néanmoins, aucune décision n’a été trouvée dans les dossiers.
Lors de la visite, deux patients étaient enfermés à clé dans leur chambre au sein de l’unité « Levallois-1 » de ce pôle :
– l’un venait d’intégrer l’unité et avait été enfermé avant-même qu’une décision médicale n’ait été prise ;
– l’autre était enfermé depuis six jours dans l’unité, après trois jours d’enfermement en unité « entrants ». Aucune décision médicale d’isolement ne figurait dans son dossier et aucune consigne médicale ne faisait référence à une décision de porte fermée. Par ailleurs, aucun élément ne faisait état d’une éventuelle absence de respect des mesures de confinement en chambre susceptible de « justifier » la fermeture de sa chambre à clé.
A la suite de ces constats, la Contrôleure générale a rappelé à la direction comme aux praticiens rencontrés que les pratiques d’enfermement sont illégales :
– en l’absence de décision prise par un psychiatre sur des considérations cliniques relatives seulement à l’état de santé mentale du patient, lorsqu’elles concernent des patients en soins sans consentement ;
– en toute hypothèse, pour des personnes admises en soins libres.
Elle a souligné que la mauvaise compréhension prétendue des gestes barrière par les patients ne pouvait justifier un enfermement systématique, cette mauvaise compréhension n’étant du reste pas démontrée, et en tout cas loin d’être générale.
Trois jours après la visite, la directrice de l’établissement a fait connaître au CGLPL que des mesures destinées à provoquer une réflexion sur la privation de liberté et à mettre fin aux pratiques constatées avaient été mises en œuvre.
Il a été demandé à la présidente de la commission médicale d’établissement d’anticiper le collège médical prévu le 29 mai sur la question du droit des patients ; un directoire extraordinaire s’est réuni le 20 mai avec l’ensemble des chefs de pôle, pour susciter de leur part une réflexion visant à mettre en accord les pratiques médicales avec le dispositif législatif relatif à l’isolement en psychiatrie.
Dans l’attente de cette réflexion et à titre conservatoire, la directrice a pris, par une note du 20 mai 2020, relative à « l’organisation des admissions des patients dans les unités d’entrants et l’unité covid », des mesures soumises à la concertation des médecins chefs de pôle lors du directoire exceptionnel. Elle prévoit notamment que les chambres accueillant des patients en soins libres ne peuvent être fermées à clé et que celles des « patients en soins sous contrainte ne peuvent être fermées à clé que sur décision médicale d’un psychiatre, qui évalue l’opportunité d’une mesure d’isolement justifiée par la situation clinique du patient ». Cette note est de nature à mettre fin aux pratiques d’enfermement abusives constatées dans les unités « entrants » et « covid », mais elle n’évoque pas la situation des patients hospitalisés au sein de l’unité « Levallois-1 » auxquels ces dispositions doivent également s’appliquer, comme à l’ensemble des patients de l’hôpital.
Les constats effectués à l’hôpital Roger Prévot résultent d’une confusion entre le régime juridique de l’isolement psychiatrique et celui du confinement sanitaire. Le CGLPL a observé que de nombreux établissements de santé mentale ont créé des unités « covid », il a été à plusieurs reprises informé d’incidents, souvent mineurs ou ponctuels, qui semblaient résulter d’une confusion comparable à celle observée à Moisselles, il a également été interrogé sur ce point par un comité d’éthique.
Pour ces raisons, la Contrôleure générale des lieux de privation de liberté adresse au ministre des solidarités et de la santé les recommandations de principe qui suivent.
Si un patient en soins libres accepte son traitement psychiatrique mais refuse l’hospitalisation dans une unité « covid », il lui est loisible de quitter l’hôpital quelle que soit sa situation au regard du covid-19. Si, en revanche, des motifs liés à sa pathologie mentale imposent que ce patient demeure hospitalisé contre sa volonté, celui-ci peut être placé en soins sans consentement. Le refus de rejoindre une unité « covid » ne peut cependant être regardé comme un refus des soins de santé mentale ; il appartient donc au médecin psychiatre, et à lui seul, d’apprécier de manière individualisée si un tel refus résulte de la pathologie psychiatrique ou du libre arbitre du patient.
L’enfermement dans leur chambre des patients qui ne respectent pas le confinement ou les gestes barrière ne peut reposer que sur une décision d’isolement motivée par la mise en danger immédiate ou imminente du patient ou d’autrui. Il doit répondre aux conditions posées par l’article L. 3222-5-1 du code de la santé publique : « L’isolement et la contention sont des pratiques de dernier recours. Il ne peut y être procédé que pour prévenir un dommage immédiat ou imminent pour le patient ou autrui, sur décision d’un psychiatre, prise pour une durée limitée. »
Comme pour toute décision d’isolement, c’est au psychiatre qu’il appartient d’apprécier si le comportement du patient est le fait de la maladie mentale, s’il est avéré qu’aucune autre formule ne peut avoir pour effet de prévenir un dommage et si le refus de respecter les gestes barrière constitue, non pas un simple risque, mais « un dommage immédiat ou imminent » justifiant une mesure aussi attentatoire à la dignité et aux droits du patient. En tout état de cause une telle contrainte ne peut être imposée ni à un patient en soins libres ni pour une durée excédant quelques heures.
Des mesures d’enfermement, de sédation ou de contention ne sauraient être justifiées par la seule considération des moyens dont dispose l’établissement (hébergement en chambre collective, insuffisance de personnel, absence de sanitaires dans les chambres, etc.) en application du principe général selon lequel aucune mesure de privation de liberté ne peut être prise ni aggravée pour des raisons d’organisation, principe qui ne peut souffrir aucune exception. Dès lors, pour un patient dont l’état clinique ne justifierait pas de telles mesures en temps ordinaire, elles doivent également être écartées en période d’épidémie.
De manière générale, les règles du code de la santé publique relatives aux soins sans consentement, à l’isolement et à la contention imposent au patient qui leur est soumis des contraintes d’une exceptionnelle gravité. Elles doivent dès lors être systématiquement interprétées de manière restrictive et toujours en conformité avec les principes qui les sous-tendent :
– elles ne peuvent être utilisées en vue d’aucune autre finalité que celles qui résultent de la lettre du texte qui les institue ;
– elles ne peuvent être appliquées qu’en considération de l’état clinique du patient au regard de ses troubles mentaux, apprécié par un psychiatre et régulièrement réévalué, et non au regard d’un éventuel risque infectieux ;
– elles doivent avoir pour unique finalité la stabilisation de la crise psychiatrique qui a conduit à les décider ;
– la nature et la durée des mesures prises doivent être limitées par les principes de nécessité et de proportionnalité.
Si la situation constatée le 18 mai à l’hôpital Roger Prévot semble avoir cessé à la suite de l’intervention du CGLPL, il demeure indispensable que des directives soient immédiatement adressées à l’ensemble des services de santé mentale afin de lever toute ambiguïté relative à l’interprétation de la notion de mesure de confinement sanitaire dans les unités d’hospitalisation. Il convient de rappeler la nature et le champ d’application des mesures de confinement et d’isolement psychiatrique et, en toute hypothèse, la proscription de l’enfermement de patients au titre du confinement sanitaire, quel que soit leur statut d’admission.
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Titre – 03 juin 2020 – Contrôleure Générale des Lieux de Privation de Liberté – – Recommandations minimales pour le respect de la dignité et des droits fondamentaux des personnes privées de liberté
Au JORF n°0061 du 12 mars 2020 a été publiée l’ordonnance n° 2020-232 du 11 mars 2020 relative au régime des décisions prises en matière de santé, de prise en charge ou d’accompagnement social ou médico-social à l’égard des personnes majeures faisant l’objet d’une mesure de protection juridique. Les deux objectifs majeurs du texte sont l’harmonisation des dispositions entre les Codes (notamment entre le Code civil et le Code de la santé publique pour les droits des usagers) et le renforcement de l’autonomie de la personne protégée.Comme souligné dans le rapport au Président de la république, les dispositions du Code de la santé publique visent de manière générale « le représentant légal » pour l’exercice des droits, sans précision de l’étendue de la mesure de protection (assistance juridique ou représentation de la personne). Les modifications apportées par l’ordonnance au sein du CSP viennent préciser la qualité du « représentant légal » mettant fin à certaines incertitudes.Une distinction claire est opérée entre la « représentation » et » l’assistance de la personne » : le texte précise, pour viser le tuteur, » mesure de protection juridique avec représentation relative à la personne », et « mesure de protection juridique avec assistance à la personne » pour le curateur, pour le mandataire.
Par ailleurs, cette ordonnance vient renforcer les droits des majeurs protégés atténuant le rôle de la personne chargée d’une mesure de protection juridique et replaçant les majeurs protégés en tant qu’acteurs des décisions les concernant.L’exercice du droit à l’information, du droit de consentir – parmi les dispositions phares – ne présente plus l’alternative entre l’exercice de ce droit par la personne (sous entendue majeure et capable) – ou son représentant légal (tuteur) mais, en premier lieu, l’information de l’intéressé, qu’il soit majeur capable ou majeur incapable, prévoyant une information adaptée aux capacités de compréhension pour la personne protégée, et en deuxième lieu, celle de la personne chargée d’une mesure de protection juridique avec représentation relative à la personne.
- La situation de la personne âgée de plus de 18 ans : le majeur « capable » (au sens du Code civil, disposant pleinement de la « capacité juridique »)
- La situation de la personne n’ayant pas atteint l’âge légal de la majorité : la personne mineure ( « incapable mineur »), représentée par les personnes titulaires de l’autorité parentale ou le tuteur
- La situation de la personne protégée en raison de l’altération de ses facultés de discernement et de compréhension : le majeur protégé ( « incapable majeur »)
Le droit à l’information médicale des majeurs protégés était en effet exercé par le tuteur, au même titre que les mineurs qui se voyaient représenter par les personnes titulaires de l’autorité parentale ou le tuteur.
« Cette information est également délivrée à la personne chargée d’une mesure de protection juridique avec représentation relative à la personne. Elle peut être délivrée à la personne chargée d’une mesure de protection juridique avec assistance à la personne si le majeur protégé y consent expressément. ».
– Le recueil du consentement du patient
« Dans le cas où le refus d’un traitement par la personne titulaire de l’autorité parentale ou par le tuteur si le patient est un mineur, ou par la personne chargée de la mesure de protection juridique s’il s’agit d’un majeur faisant l’objet d’une mesure de protection juridique avec représentation relative à la personne, risque d’entraîner des conséquences graves pour la santé du mineur ou du majeur protégé, le médecin délivre les soins indispensables. »
Lorsque la personne majeure fait l’objet d’une mesure de protection juridique avec assistance, la personne chargée de l’assistance peut accéder à ces informations avec le consentement exprès de la personne protégée. «
Auparavant, l’article L.1111-14 disposait : « Le dossier médical partagé est créé sous réserve du consentement exprès de la personne ou de son représentant légal. »
De fait, ipso facto l’accord émanait du représentant légal sans information ni recueil de l’avis de l’intéressé majeur protégé.
Désormais, le législateur consacre l’ouverture automatique du dossier médical partagé sauf opposition du majeur protégé mais également de la personne chargée de la mesure de protection.
Les nouvelles dispositions sont rédigées comme suit :
L’ordonnance a également modifié plusieurs dispositions relatives aux recherches biomédicales :
– Accès aux informations à la majorité de la personne mineure – « Lorsqu’à la date de la fin de la recherche, la personne mineure qui s’y est prêtée a acquis la capacité juridique, elle devient personnellement destinataire de toute information communiquée par l’investigateur ou le promoteur « – Article L.1122-2 du CSP.
– Intervention du Conseil de famille, s’il est constitué, pour une personne majeure – » Lorsqu’une recherche impliquant la personne humaine est effectuée sur une personne majeure faisant l’objet d’un mandat de protection future, d’une habilitation familiale ou d’une mesure de tutelle, avec représentation relative à la personne, l’autorisation est donnée par la personne chargée de la représenter. Toutefois, si le comité mentionné à l’article L. 1123-1 considère que la recherche comporte, par l’importance des contraintes ou par la spécificité des interventions auxquelles elle conduit, un risque sérieux d’atteinte à la vie privée ou à l’intégrité du corps humain, l’autorisation est donnée par le conseil de famille s’il a été constitué ou par le juge des tutelles » – Article L.1122-2 du CSP.
– La procédure de règlement amiable en cas d’accidents médicaux, d’affections iatrogènes ou d’infections nosocomiales
L’obligation d’information en cas de dommages liées aux soins se voit étendue, toujours dans la continuité des modifications apportées par cette ordonnance, à la personne protégée.
Cette obligation avait été posée en 2002 au sein de l’article L.1142-4 du Code de la santé publique :
« Toute personne victime ou s’estimant victime d’un dommage imputable à une activité de prévention, de diagnostic ou de soins ou ses ayants droit, si la personne est décédée, ou, le cas échéant, son représentant légal, doit être informée par le professionnel, l’établissement de santé, les services de santé ou l’organisme concerné sur les circonstances et les causes de ce dommage.
Cette information lui est délivrée au plus tard dans les quinze jours suivant la découverte du dommage ou sa demande expresse, lors d’un entretien au cours duquel la personne peut se faire assister par un médecin ou une autre personne de son choix. »
L’information sera délivrée à la personne victime (ou s’estimant victime), à ses ayants droit (en cas de décès), à son représentant légal (si elle est mineur), et si la victime est un majeur protégé, la personne chargée de la mesure de protection doit également être informée.
La personne qui s’estime victime d’un préjudice du fait d’un dommage imputable à une activité de prévention, de diagnostic ou de soins peut également saisir la Commission Régionale d’Indemnisation et de Conciliation.
Instaurée par la loi 2002-303 du 04 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé, la Commission Régionale d’Indemnisation et de Conciliation se présente comme une alternative préalable à la procédure contentieuse devant les juridictions permettant dans un premier temps à la personne qui s’estime victime d’un préjudice d’avoir un avis sur les causes, conséquences des dommages d’une action liée aux soins, et de se voir proposer une indemnisation.
L’ordonnance vient décliner les personnes habilitées à saisir la Commission, en incluant désormais la personne protégée, précisant que si la victime est un majeur faisant l’objet d’une mesure de protection juridique avec représentation, la personne chargée de cette mesure peut également saisir la commission. – Article L.1142-7 du CSP.
– Les programmes d’éducation thérapeutique
» La mise en œuvre du programme d’apprentissage est subordonnée au consentement écrit du patient ou de ses représentants légaux » précisait l’article L.1161-5 du Code de la santé publique.
Désormais, la personne chargée d’une mesure de protection juridique donnera son consentement seulement si le majeur protégé n’est pas apte à exprimer s volonté, et toujours en tenant compte de son avis : » s’il s’agit d’un majeur faisant l’objet d’une mesure de protection juridique avec représentation relative à la personne qui n’est pas apte à exprimer sa volonté, de la personne chargée de la mesure de protection juridique, en tenant compte de son avis« .
II – Modifications des dispositions du Code de l’action sociale et des familles
Le Code se voit modifié par la préoccupation de recentrer la place du majeur protégé dans le système décisionnel en envisageant la représentation par la personne chargée d’une mesure de protection juridique dès lors que l’intéressé n’est pas apte à exprimer son avis et en prévoyant toujours l’obligation de tenir compte de l’avis de la personne protégée.
* La personne âgée faisant l’objet d’une mesure de protection juridique sera ainsi invitée à donner son avis pour l’échange d’informations entre professionnels prenant en charge l’intéressée pour l’intégration des services d’aide et de soins dans le champ de l’autonomie – Article L.113-3 du CASF : » Lorsque l’intéressé fait l’objet d’une mesure de protection juridique avec représentation relative à la personne et n’est pas apte à exprimer sa volonté, la personne chargée de la mesure ou, à défaut, la personne de confiance mentionnée à l’article L. 1111-6 du même code est compétente pour consentir aux échanges d’information mentionnés au deuxième alinéa du III de l’article L. 1110-4 du code de la santé publique, en tenant compte de l’avis de la personne protégée. »
* Le législateur insiste à trois reprises sur le recueil de l’avis de la personne handicapée dans le cadre du droit à la compensation de la personne prenant en compte ses besoins et ses aspirations. – Article L.1114-1-1 du CASF.
De même les décisions relatives au plan d’accompagnement global doivent prendre en compte l’avis de la personne protégée.
L’ancienne rédaction de l’article L.146-9, deuxième alinéa, » les décisions relatives au plan d’accompagnement global ne sont valables qu’après accord exprès de la personne handicapée ou de son représentant légal » est remplacée par la disposition suivante : « les décisions relatives au plan d’accompagnement global ne sont valables qu’après accord exprès de la personne handicapée ou de son représentant légal s’il s’agit d’un mineur ou, s’il s’agit d’un majeur faisant l’objet d’une mesure de protection juridique avec représentation relative à la personne qui n’est pas apte à exprimer sa volonté, de la personne chargée de cette mesure, en tenant compte de l’avis de la personne protégée« .
* L’accès aux origines personnelles du majeur protégé lui est directement ouvert, ce dernier étant habilité à présenter lui-même une demande d’accès à la connaissances des origines de l’enfant devant le Conseil national pour l’accès aux origines personnelles.- Articles L.147-2, L.224-7 du CASF
NB : L’article 32 de l’ordonnance indique en effet que » A l’article L. 147-2 du même code, les mots : «-s’il est majeur placé sous tutelle, par son tuteur ; » sont supprimés« . Précision nécessaire car la version en ligne du Code sur Légifrance n’a pas encore été mise à jour..
* L’avis de la personne protégée doit être pris en compte dans les préférences d’établissements ou de structures susceptibles de l’accueillir qui ont été indiquées par la personne chargée d’une mesure de protection juridique auprès de la Commission des droits et de l’autonomie des personnes handicapées – Article L.241-6 du CASF.
=> Lien pour accéder au rapport du Président de la république : https://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000041711947&categorieLien=id
=> Lien pour accéder au texte : https://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000041712000&categorieLien=id
Adeline HAZAN décline 67 recommandations (résumé des recommandations proposé à partir de la page 157 du document).
– L’évocation à la page 21 du programme QualityRights de l’Organisation Mondiale de la santé, programmé déployé sur le territoire national (notamment) par le Centre collaborateur de l’OMS pour la Recherche et la Formation en santé mentale (CCOMS).
– La professionnalisation des médiateurs de santé pairs dans le cadre d’un programme co-piloté par le CCOMS mentionnée à la page 79.Pour en savoir plus sur les MSP : http://www.ccomssantementalelillefrance.org/?q=programme-%C2%AB%C2%A0m%C3%A9diateur-de-sant%C3%A9pair%C2%A0%C2%BB
=> Lien pour accéder au document : https://www.cglpl.fr/wp-content/uploads/2020/06/Rapport-soins-sans-consentement-et-droits-fondamentaux_web.pdf