Sur l’Adamant : le Centre a assisté à l’avant-première à Lille

Stagiaire en communication au sein du CCOMS, Rémi Descamps est allé voir le film documentaire « Sur l’Adamant », en avant-première, ce mardi 18 avril à Lille, en présence de Linda de Zitter, psychologue co-fondatrice de la structure. 

L’Adamant, c’est une péniche amarrée au Quai de la Rapée, à Paris, mais aussi et surtout un hôpital de jour, intégré aux Hôpitaux de Saint-Maurice et qui accueille des patients de tous horizons. Réalisé par Nicolas Philibert, le documentaire – qui a reçu l’Ours d’Or 2023 du Festival international du film de Berlin –  propose de suivre ces patients dans leur vie quotidienne.

Filmé à hauteur de patient, le documentaire prend son temps. Plans fixes, silences, tout est fait pour favoriser l’expression la plus spontanée et sereine possible des usagers – et pour cause : Nicolas Philibert a passé 7 mois sur cette structure, ce qui a permis un « apprivoisement mutuel » avec les patients, selon les mots de Linda de Zitter. La caméra suit toujours l’inlassable et intarissable flot de leurs pensées, chaotique souvent, émouvant, drôle ou dramatique parfois, ainsi que de leurs histoires personnelles. L’objectif évident de cette démarche est la déstigmatisation des usagers, qui ne se résument jamais à leur pathologie – aucun diagnostic, d’ailleurs, n’est mentionné au cours du film.  

La structure et ses soignants, eux, mettent un point d’honneur à l’expression de la spontanéité des patients, de leurs talents créatifs – instruments de musique divers, utilisés à l’occasion de scènes mémorables, bibliothèque et ateliers écriture, cinéma (« cinéma-club »), dessin et peinture, jardinage ou encore broderie, entre autres.                                                                                                                               

De même, l’empowerment des usagers est une priorité – jamais on ne considère ces derniers comme des malades dépourvus d’agentivité*. C’est ainsi que l’on voit une réunion soignants-soignés systématiquement co-animé par un patient ; une co-gestion, avec les patients, de la trésorerie de la structure, de son potager, ou encore de sa buvette. Les patients ont également le libre choix de leurs ateliers thérapeutiques, tout autant qu’ils peuvent en proposer de nouveaux. L’Adamant et ses soignants, néanmoins, gardent conscience que des progrès restent à faire, ce qu’illustre bien le quasi-monologue, à la fin du film, d’une patiente déplorant qu’elle ne puisse pas animer elle-même un atelier thérapeutique qui lui tient à cœur – une critique jugée pertinente par les soignants.           

Suite à la séance, Linda de Zitter détaille sa vision plus globale de la psychiatrie, qui est celle de la structure. Sur les pas de Franco Basaglia (père du mouvement de la psychiatrie citoyenne, en rupture avec une vision asilaire et ségrégative de celle-ci), elle appelle à « traverser les murs dans nos têtes […] traverser les murs de la cité ». Ce dernier décloisonnement, illustré par la pluridisciplinarité des soignants au sein de la structure, appelle un partenariat plus étroit, selon de Zitter, de la psychiatrie avec les acteurs du médico-social, de l’éducation, du monde des arts, etc. En somme, un travail en bonne intelligence entre tous les acteurs agissant sur les déterminants de la santé, à l’image de ce que mènent les CLSM.                                                                                                                            

Elle ajoute que l’Adamant a déjà fait sienne cette démarche, en étant situé au cœur de la cité, mais aussi et surtout en s’ouvrant à celle-ci – animateurs des ateliers extérieurs au monde psychiatrique, réhabilitation psychosociale dans la cité, etc. La psychothérapie institutionnelle est, selon elle, un « positionnement politique » à tenir dans le temps, qui n’est jamais gagné. Enfin, elle revendique une vision holistique des usagers en psychiatrie – ce qui compte, ce n’est pas les symptômes, mais l’« arrière-pays » de chacun. Il appartient aux soignants d’explorer cet arrière-pays chez les patients, afin de permettre à chacun de découvrir ses talents, parfois mis sous silence par la maladie et l’histoire personnelle, dans le cadre le plus propice possible.  

Retrouvez « Sur l’Adamant » en salles à partir de ce mercredi 19 avril.

* en l’occurrence, perception de soi comme acteur de son existence, et non comme simple spectateur.